Souvent emprunt d’une connotation négative, on pense souvent que l’effet placebo relève plus de la supercherie que de la thérapie stricto sensu. Il a longtemps été associé aux charlatans et leurs solutions miracles mais aussi par les chercheurs qui utilisent l’effet placebo lors d’essais randomisés pour étudier l’efficacité de molécules médicales par exemple. Son étymologie « Placebo » du latin plaire, désignant un comportement de réponse du patient pour «plaire» au médecin, a longtemps nui à sa juste appréciation.
« Placebo » qui veut plaire
Mais de nombreuses études en psychologie ou neurosciences se sont penchées sur le sujet depuis de nombreuses années et permettent de redonner à l’effet placebo çà juste place.
Le neurologue italien Fabrizio Benedetti a publié plusieurs études expliquant ce phénomène psychobiologique. Ainsi, si vous prenez un cachet dont vous êtes convaincu qu’il va soulager vos maux de tête, votre corps va libérer des endorphines, soit des molécules analgésiques naturellement produites par votre organisme. Les travaux de Fabrizio Benedetti ont également révélé que l’injection d’une solution saline placebo chez des patients atteints de la maladie de Parkinson entraînait dans le cerveau une libération massive de dopamine (dont la déficience signe justement la maladie).
=> Implication du système inhibiteur descendant de la douleur dans l’effet placebo.
C’est l’imagerie fonctionnelle cérébrale qui a permis de visualiser l’activation des structures impliquées dans la perception de la douleur et sa modulation pendant une analgésie placebo.
En d’autres termes : votre cerveau vous aide à puiser dans votre « pharmacie interne » ! Et même lorsque l’on prend un vrai médicament, 20 à 30 % de l’effet positif qu’il provoque provient d’un effet placebo.
Certaines pathologies semblent plus sensibles à l’effet « positif « de l’effet placebo. C’est notamment le cas des pathologies impliquant le système nerveux central comme les algies chroniques, l’asthme, les troubles cardiovasculaires, la maladie de Parkinson.
En 1987, le médecin anglais K-B Thomas a mené une expérience sur 200 patients en Angleterre. Les membres du premier groupe ont reçu une consultation « positive » avec un médecin très optimiste sur leurs chances de guérison, tandis que ceux du second groupe ont fait face à une consultation moins rassurante qui émettait des doutes sur la perspective de guérison. Aucun médicament n’était prescrit aux membres des deux groupes. Verdict : 64% des patients issus du premier groupe allaient mieux 2 semaines plus tard, contre 39% du deuxième groupe. Les facteurs du succès seraient a priori l’optimisme du médecin, mais aussi le temps consacré à l’écoute du patient et à l’étude de ses symptômes.
L’ostéopathie dans tout çà ?
Les détracteurs de l’ostéopathie misent bien souvent tout sur l’effet placebo pour expliquer d’éventuels résultats bénéfiques de la pratique ostéopathique. Que répondre à cela ?
Personnellement, une conception plutôt cartésienne de notre environnement, une méthodologie scientifique m’ont longtemps fait nier l’importance de l’élément « placebo » dans la prise en charge de mes patients. Mais le temps passant, les retours d’expériences faisant, j’ai pu constater la part prépondérante du patient lui-même dans la réussite d’une prise en charge. Certainement par vanité, je le confesse, le thérapeute se donne trop d’importance dans la réalisation de son traitement et en oublie que le principal acteur de la thérapie est là, sous nos mains: le patient est son propre médicament.
Si la main d’un thérapeute peut guérir ou soulager un certain nombre de pathologies sans effets iatrogènes, on ne peut que s’en féliciter. Peu importe que le mode d’action soit spécifique, symbolique ou lié au toucher bien intentionné du praticien. L’effet placebo a trop longtemps été connoté péjorativement par sa fonction dans les essais randomisés. La consultation au chevet du malade doit réintégrer la complexité de la personne souffrante. La recherche clinique, pour performante qu’elle soit, cherche au contraire à rendre les groupes homogènes. Pour ce faire, elle gomme les différences entre les patients pour en faire des cas identiques. L’ostéopathie peut donc, dans un tel contexte, trouver sa place dans le vaste champ de l’exercice médical. Une condition doit cependant être respectée : la qualité de la formation des praticiens.
Pour aller plus loin:
- http://www.chu-rouen.fr/page/effet-placebo
- Effet placebo analgésique: apport des neurosciences. Chantal Berna, Yann Cojan, Patrik Vuilleumier, Jules Desmeules, Rev Med Suisse 2011; volume 7. 1390–1393
- Benedetti F, Carlino E, Pollo A. How placebos change the patient’s brain. Neuropsychopharmacology 2011;36:339-54.
- Magazine Docteur Good, Janvier-Février 2021, EditionReworld Media
- https://www.eovi-mcd.fr/eovi-mcd-mag/mieux-comprendre/comment-fonctionne-l-effet-placebo
- Fabrizio Benedetti. Placebo Effects: Understanding the mechanisms in health and diseas, Published to Oxford Scholarship Online: September 2009
- Interest of osteopathy, P. Klein, Y. Lepers et W. Salem, Service d’Ostéopathie, Faculté des Sciences de la Motricité, ULB
Laisser un commentaire